gougerot sjogren

Focus sur une pathologie

Maladie (ou syndrome) DE SJOGREN

Le syndrome de Gougerot-Sjögren, appelé syndrome de Sjögren par les anglo-saxons, est une maladie autoimmune, c’est à dire une maladie qui est liée à un excès de l’immunité. Cette « hyperimmunité » au cours du syndrome de Gougerot-Sjögren peut entraîner une inflammation de différents tissus ou organes, comme les glandes salivaires et lacrymales (qui produisent la salive et les larmes) ou, moins souvent, d’autres organes comme les poumons, les reins et les nerfs. Le syndrome de Sjögren peut exister de manière isolée (syndrome de Sjögren primaire) ou associé à d’autres maladies auto-immunes (comme le lupus, la polyarthrite rhumatoïde, la sclérodermie ou d’autres…), on parle alors de syndrome de Sjögren associé ou secondaire. Le syndrome de Sjögren tire son nom d’un médecin français, Henri Gougerot et d’un ophtalmologiste suédois, Henrik Sjögren qui furent les premiers à décrire cette maladie.

SYNDROME DE GOUGEROT SJOGREN

Epidemiologie

Le syndrome de Sjögren primaire est une maladie assez rare qui touche moins de 1 personne sur 2000 (ou 1,2 personne sur 2000 lorsque l’on parle de syndrome de Sjögren associé). Il s’agit le plus souvent de femmes entre 40 et 60 ans (le sex ratio est en faveur des femmes avec 9 femmes pour 1 homme atteint). La maladie peut se déclarer plus tôt, parfois même chez l’enfant.

SYNDROME DE GOUGEROT SJOGREN

MANIFESTATIONS CLINIQUES

Quels sont les symptomes du syndrome de Sjögren ?

Le plus souvent, la maladie débute par une sécheresse des yeux et de la bouche, des douleurs articulaires et une grosse fatigue. Cette grande fatigue n’est pas liée à l’atteinte grave d’un organe mais à un état général fragile. La sécheresse de la bouche et des yeux peut se manifester par l’impression d’avoir du sable ou du coton dans la bouche ou une bouche « pâteuse », du sable dans les yeux et les yeux collés (comme lors d’une conjonctivite). La sécheresse du nez et des voies respiratoires peut se traduire par une toux sèche. La peau et le vagin peuvent aussi être secs.

Chez près d’un tiers des patients, d’autres atteintes peuvent survenir comme celles des articulations, des poumons ou des nerfs par exemple.

          L’atteinte articulaire se traduit par des douleurs articulaires et parfois des gonflements.

          L’atteinte des nerfs se manifeste par des sensations de décharge électrique ou de fourmillement avec rarement un manque de force.

          L’atteinte pulmonaire peut ne donner aucun signe ou donner un emphysème (dilatation des alvéoles pulmonaires) ou une autre atteinte

          L’atteinte du rein, du cerveau, du muscle ou d’autres organes sont extrêmement rares

Chez 5% des patients, un lymphome (tumeur maligne des cellules lymphatiques) peut survenir, le plus souvent dans la glande salivaire principale (la parotide). Il s’agit le plus souvent d’un cancer de bon pronostic s’il est détecté rapidement.

 

parotidomégalie gougerot sjögren
xerophtalmie gougerot sjogren
xerostomie sjogren

SYNDROME DE GOUGEROT SJOGREN

DIAGNOSTIC

Pour être certain d’avoir un syndrome de Gougerot-Sjögren il faut :

          Evaluer la sécheresse oculaire au moyen d’une bandelette (test de Schirmer) ou de colorants (test au vert de lissamine ou à la fluorescéine)

          Evaluer la sécheresse buccale en mesurant le débit (flux) salivaire (crachats répétés dans un tube pendant 5 minutes)

          Faire des analyses sanguines avec la recherche de certains anticorps comme les anticorps anti-SSA / anti-SSB est utile. Il existe aussi chez certains patients un taux élevé d’anticorps (hypergammaglobulinémie polyclonale) et plus rarement une petite baisse des globules blancs (surtout des lymphocytes)

          La biopsie des glandes salivaires accessoires est une petite intervention chirurgicale, réalisée sous anesthésie locale, qui permet d’analyser au microscope les petites glandes de la lèvre et de rechercher les signes d’inflammation

 

histologie sjogren

SYNDROME DE GOUGEROT SJOGREN

PATHOGENIE

Le syndrome de Sjögren n’est pas héréditaire. Il est exceptionnel de trouver dans une même famille plusieurs patients ayant un syndrome de Sjögren, même s’il peut exister d’autres maladies auto-immunes dans la même famille (thyroïdite auto-immune, …).

On ne connaît pas de facteurs déclenchant de la maladie même si on suspecte le rôle de certaines infections virales chez des patients ayant un « terrain » prédisposant.

SYNDROME DE GOUGEROT SJOGREN

TRAITEMENTS

Le suivi du syndrome de Sjögren doit être effectué une fois par an dans les formes sans complication récente et une fois par 3 à 6 mois chez les autres cas. Un suivi plus régulier par un dentiste, par un stomatologue et par un ophtalmologue est également nécessaire.

En cas de fièvre prolongée, sueurs importantes, perte de poids involontaire importante ou l’apparition d’un gonflement persistant d’une glande parotide ou d’un ganglion, il faut aller consulter rapidement un spécialiste.

 

Le traitement de la sécheresse :

Il faut d’abord éviter les médicaments qui augmentent la sécheresse comme certains antidépresseurs, antalgiques (comme la morphine) et anxiolytiques. Il faut aussi arrêter de fumer.

Un traitement par chlorhydrate de pilocarpine peut diminuer les signes de sécheresse chez environ 1 patient sur 2, quand il est bien supporté. Ceci nécessite de débuter ce traitement à des doses faibles (2 à 2,5mg/jour au début) puis augmenter progressivement jusqu’à 10 à 20mg/jour.

D’autres traitements « locaux » comme les lames artificielles, certains gels et certains humidifiants peuvent être utiles.

 

Le traitement des douleurs :

En cas de douleurs, il faut essayer de contrôler les symptômes douloureux. Cette prise en charge de la douleur est importante et fait appel à différents traitements symptomatiques qui ne sont pas spécifiques du syndrome de Sjögren, par exemple le paracétamol.

Il faut privilégier les médicaments de la douleur qui n’augmentent pas la sécheresse.

 

Le traitement de la fatigue :

L’exercice physique, les techniques de relaxation et le recours parfois à une prise en charge psychologique peuvent être utiles.

 

Le traitement des complications de la maladie :

          La cortisone n’est pas très utile dans le syndrome de Sjögren, sauf de manière transitoire en cas de gonflement douloureux des glandes salivaires, de gonflements articulaires, ou lors de complications graves (lymphome, vascularite)

          L’hydroxychloroquine (Plaquenil®), le Méthotrexate (Novatrex®, Metoject®) ou le Leflunomide (Cellcept) peuvent être utiles en cas de douleurs articulaires

          Certains traitements immunomudulateurs comme le rituximab (Mabthera®), le cyclophosphamide (Endoxan®), l’azathioprine (Imurel®) ou le mycophénolate mofétil (Cellcept®) peuvent être proposés en cas de poussée sévère de la maladie

          En cas de lymphome, le Rituximab (Mabthera®) est prescrit, parfois en association à une chimiothérapie

 

L’éducation thérapeutique

Le traitement et la maladie doivent être expliqués au patient grâce à des documents adaptés. Le centre de référence de Strasbourg a créé récemment un programme d’éducation thérapeutique spécifiquement ciblé sur le syndrome de Gougerot-Sjögren, qui permettra aux patients et à leurs proches d’acquérir des compétences de sécurité, d’auto-soin et d’adaptation dans plusieurs domaines (gestion des traitements, hygiène de vie, diététique, aspects psycho-sociaux et gestion de la fatigue).

 

La recherche sur les mécanismes de la maladie

Le centre de référence est particulièrement impliqué dans la recherche sur la meilleure compréhension des mécanismes de la maladie et sur les marqueurs prédictifs de complications de la maladie. Ces recherches s’effectuent à partir de prélèvements sanguins et salivaires de patients ayant accepté de participer à ces recherches.

Très récemment, ces travaux ont permis de mieux comprendre le type d’interféron (un groupe de nombreuses protéines de l’inflammation) impliqué dans la maladie, ou l’intérêt de bloquer une molécule appelée BTK. Ces travaux feront l’objet de communications aux congrès américains et français de rhumatologie fin 2019.

La recherche sur les traitement du Gougerot Sjögren au centre de référence RESO de Strasbourg

De nouveaux traitements sont en cours d’étude. La recherche est très active dans le domaine du syndrome de Sjögren et de nouveaux patients participent aux essais cliniques, ce qui donne l’espoir de trouver des traitements plus adaptés à l’avenir. Le centre de référence de Strasbourg est particulièrement impliqué dans cette activité de recherche :

 

1) Le centre de référence de Strasbourg a un rôle moteur dans l’évaluation de différentes stratégies médicamenteuses (essais anti-TNF, hydroxychloroquine, rituximab)

 

2) Le centre de référence de Strasbourg coordonne deux essais cliniques de médicament dans le syndrome de Sjögren primitif :

          L’un est destiné à évaluer l’efficacité du traitement par Tocilizumab (un antagoniste de la protéine de l’inflammation de l’IL-6) dans un essai de phase II-III qui a inclus 110 patients et dont les résultats vont êtres communiqués au congrès américain et français de rhumatologie fin 2019

          L’autre est destiné à évaluer l’efficacité du traitement intraveineux par immunoglobulines des neuropathies sensorielles compliquant la maladie

 

3) Le centre de référence de Strasbourg co-coordonne également la cohorte ASSESS qui suit, à long terme (20 ans), l’évolution de 395 patients atteints de syndrome de Sjögren primitif.

 

4) De plus, le centre de référence de Strasbourg participe à de nombreux essais cliniques promus par l’industrie pharmaceutique.

 

5) Le centre de référence de Strasbourg a un rôle central dans le projet européen IMI (Innovative Medicine Initiative) NECESSITY qui a plusieurs objectifs : 1/identifier de nouveaux critères de jugements (cliniques et biologiques) qui pourront être utilisés dans les essais cliniques pour déterminer -avec plus de sensibilité- l’efficacité d’une nouvelle thérapie, 2/identifier de nouveaux biomarqueurs pour stratifier (classer en sous-groupes selon le type de maladie) les patients atteints de syndrome de Sjögren primitif et 3/de mettre un place un essai clinique qui permettra de tester simultanément diverses stratégies thérapeutiques  (asociation leflunomide et hydroxychloroquine ou mycophenolate mofetil et hydroxychloroquine).